Madame Catherine Gaudy, directrice générale des ressources humaines des ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation répond dans une lettre parvenue le 29 mai au courrier du Sgen-CFDT en date du 6 mai 2017 sur les refus de détachement.
Pour le Sgen-CFDT de l’étranger, cette réponse de la DGRH ouvre le débat sur la place des fonctionnaires de l’Éducation nationale dans le réseau d’enseignement français à l’étranger. Elle semble remettre en question de facto la notion de personnel résident telle qu’elle a été mise en place lors de la réforme de 1990 instituant l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, par le décret du 31 mai 1990, repris par le décret 2002-22 du du 4 janvier 2002, relatif à la situation administrative et financière des personnels des établissements d’enseignement français à l’étranger.
Le Sgen-CFDT de l’étranger peut comprendre les difficultés rencontrées dans certains territoires où des postes restent non pourvus de manière récurrente. Mais on ne peut pas faire fi de l’histoire de l’AEFE, ni revenir sans concertation sur des avancées sociales obtenues pour les recrutés locaux lauréats de concours, ni entériner des inégalités créées par des refus selon les territoires d’origine des demandeurs.
Le Sgen-CFDT de l’étranger continuera à se mobiliser pour aider les collègues confrontés à un refus alors que leur situation justifie amplement qu’un détachement leur soit accordé.
Le Sgen-CFDT de l’étranger appelle à une large concertation de l’ensemble des partenaires concernés : ministères chargés des affaires étrangères et de l’éducation nationale, opérateurs de l’enseignement français à l’étranger, associations de parents et organisations syndicales pour fluidifier l’interministérialité, apporter des gages au bon fonctionnement du réseau des EEFE et avancer de façon concertée et négociée sur les questions statutaires en tenant compte de l’histoire.
- Réponse de la DGRH sur les refus de détachement 2017-5-22
Monsieur Alain Schneider
Secrétaire général du Sgen-CFDT de l’étranger
47 avenue Simon Bolivar
75950 PARIS CEDEX 19
Paris, le 22 mai 2017
Monsieur le Secrétaire général,
Par votre courrier du 6 mai 2017, vous souhaitez attirer mon attention sur les refus de détachements opposés à certains enseignants pour exercer à l’étranger, notamment dans le cadre d’un premier départ.
Satisfait de la décision favorable à toute demande de renouvellement de détachement dans le réseau de l’enseignement français à l’étranger prise en février dernier, vous restez préoccupé quant aux refus annoncés suite à des premières demandes de détachement formulées récemment.
Le ministère de l’Education nationale, en détachant 10 000 titulaires, contribue largement au développement de l’enseignement français à l’étranger. Cet objectif ne saurait toutefois être atteint au détriment de la réponse aux besoins d’enseignement sur le territoire national.
Les services académiques sont pleinement compétents pour apprécier les tensions en ressources humaines prévisibles dans le cadre de la préparation d’une rentrée, compte-tenu notamment des résultats aux concours de recrutements et du mouvement national des personnels. Les académies ont désormais une gestion prévisionnelle fine de leurs ressources et définissent des règles afin de couvrir leurs besoins, tout en offrant à leurs nouveaux personnels la perspective d’une mobilité future.
Les nécessités de service évoquées pour refuser un détachement se limitent aux académies qui connaissent des situations de tension dans les recrutements et les affectations de personnels (absence de vivier, disciplines déficitaires, prise en compte du mouvement intra et inter académique).
Sur ce point, je ne peux que me féliciter de l’implication des académies dans la recherche d’un équilibre entre accès à la mobilité pour tous les personnels, qualité de l’enseignement, apport de la formation et expériences diversifiées. Elles sont invitées par l’administration centrale à étudier avec bienveillance et discernement toutes les situations individuelles sensibles.
Par ailleurs, vous proposez « la résidentialisation à l’AEFE dès la titularisation des agents lauréats de concours ex-recrutés locaux ». Votre proposition me semble poser problème au regard des autres personnels à l’étranger [1] et au regard des règles élémentaires d’accès à la fonction publique et d’égalité d’accès à la mobilité pour tout titulaire.
L’existence même de règles nationales constitue une garantie d’équité entre tous les candidats : aucune mesure dérogatoire n’existe et n’est envisagée pour les lauréats des concours résidant sur le territoire national et les candidats résidants à l’étranger ne peuvent prétendre à des mesures spécifiques les exonérant d’exercer dans leur académie de recrutement.
Par ailleurs, je souhaite vous rappeler que renforcer la qualité de l’enseignement français par une professionnalisation accrue des personnels est un objectif essentiel de l’action de l’Etat dans le réseau étranger, et ce notamment dans un contexte de compétition internationale forte en matière d’éducation et de ressources humaines. Or, cette professionnalisation ne peut reposer sur la seule réussite à un concours. Il est par conséquent indispensable pour les nouveaux recrutés d’avoir non seulement une bonne connaissance du système éducatif français, mais aussi de disposer d’une expérience suffisante de son enseignement sur le territoire français afin de pouvoir l’exporter et l’adapter au mieux au contexte local quel qu’il soit, quand bien même celui-ci serait déjà connu, et le cas échéant, d’être à même d’exercer sur le territoire français dans la suite de leur carrière.
Vous évoquez enfin une possibilité de mobilité de poste à poste à l’étranger ou la « résidentialisation à l’AEFE des agents vivant à l’étranger et placés en disponibilité ». Tout personnel titulaire de l’éducation nationale exerçant en France doit pouvoir envisager une mobilité à l’étranger au cours de sa carrière. Il n’est pas envisageable d’identifier, à l’intérieur des corps enseignants actuels, une catégorie d’enseignants dont la seule vocation serait d’enseigner à l’étranger ; une telle mesure serait entachée d’inégalité au sein des membres d’un même corps, et reste par ailleurs contraire à la volonté de l’Etat de favoriser la mobilité et la professionnalisation de tous les enseignants.
Pour ce qui concerne les personnels en disponibilité, je vous rappelle que cette position relève de la seule compétence des académies, lesquelles prennent leur décision, en dehors des cas de disponibilité de droit, selon les mêmes contraintes évoquées : nécessités de service, politique de mobilité académique, situations individuelles. Il ne m’appartient pas d’interférer dans ces décisions.
Pour toutes ces raisons, vous comprendrez que je demande à mes services de rester vigilants sur l’application stricte des règles de gestion garantissant égalité et équité. Toutefois, j’invite les académies à étudier avec bienveillance les situations particulières des agents détachés ou souhaitant être détachés à l’étranger.
Veuillez agréer, Monsieur le Secrétaire général, mes salutations distinguées.
La directrice générale des ressources humaines
Catherine GAUDY
[1] Environ 5 400 titulaires sont résidents détachés auprès de l’AEFE, mais il y a aussi environ 2 500 titulaires détachés dans tous les autres établissements partenaires faisant partie intégrante du réseau de l’enseignement français à l’étranger homologué