La CFDT Éducation monde a recueilli le témoignage de Ronald lors de son installation en Iran et en Arabie Saoudite.

Ronald, personnel de direction en Iran et en Arabie Saoudite
« J’ai été un chef d’établissement heureux »
C’est la conclusion de Ronald repassant ses souvenirs de deux contrats en tant que proviseur. Mais le bonheur, ça passe par l’adaptation. Comme en milieu militaire en fait : on cherche l’info, on s’adapte sinon on y passe.
Le premier écueil, c’est le manque d’informations en amont. À se demander si ça n’est pas top secret ? Alors que ça éviterait bien des bourdes… L’avant est aussi important que le pendant. Mais, avant, l’Agence dit sans dire ; pendant, le corps diplo t’ébouillante à l’eau froide !
Première adaptation à prévoir, Ronald y insiste, travailler avec un conseil de gestion. Trop souvent, les collègues partent avec l’idée de défendre l’enseignement à la française alors qu’ils feront seulement de l’enseignement du français à l’étranger. Et ils se retrouvent face à des parents qui sont des consommateurs. Et qui entendent être pris en charge avec leurs caprices, leurs envies… Sans oublier de faire du chiffre, d’augmenter les effectifs. Car le conseil de gestion, composé de parents, c’est lui qui tient les cordons de la bourse ! Alors, si on continue de faire croire au chef d’établissement qu’il va avoir la maîtrise complète, grosse déception.
Mais, si le chef d’établissement réussit son entrée puis s’adapte dans le respect des parents et de leur culture, alors il peut prendre de l’ampleur, avoir de la marge, construire, tout se permettre ! Comme au théâtre : ne pas louper son entrée, tu ne t’en remets pas. Ensuite, appliquer les valeurs kanak : respect & humilité. Respect pour l’interlocuteur quel qu’il soit. Humilité car le proviseur n’est pas chez lui, il ne possède pas les codes ni la culture ni les réseaux. Mais le respect est rendu au centuple. Alors, le personnel de direction (Perdir) a gagné le temps de s’adapter, il peut « donner du temps au temps ».
Deuxième adaptation à prévoir, les relations avec l’Ambassade. Toute personne ayant exercé à l’étranger le sait : l’école française n’est jamais dans les petits papiers de l’Ambassade. L’explication ? Selon Ronald, l’école est toujours pour elle synonyme de problèmes. Au mieux de problèmes à venir. Et si les agents du MEN prennent au sérieux leur rôle de service public et cherchent des solutions aux problèmes, la culture du MAE, c’est plutôt celle de la patate chaude…
Neige sur le lycée de Téhéran
Troisième adaptation, ne pas compter non plus sur l’appui de l’Agence. Un Perdir, c’est un fusible spécialisé en frustrations. Si le conseil des parents est intouchable, l’ambassade encore plus, l’agence c’est pire : elle fait la morale en jouant double ou triple jeu.
Pour résumer, la problématique du chef d’établissement à l’étranger est particulière : il se retrouve au centre. Ou à l’intersection. Intersection des intérêts – bien sûr contradictoires – du poste, du conseil de gestion et de l’AEFE.
Une fois que les choses sont claires, il faut sauter sur l’occasion de partir à l’étranger !
Car, oui, le Perdir heureux, c’est à l’étranger qu’on le trouve.
Il ne peut compter sur le poste ou sur l’Agence ? Mais il a une équipe de direction et elle prend tout son sens à l’étranger. Il faut la jouer collégiale. La verticalité napoléonienne, on oublie.

Al Khobar
La pression, la quantité de travail ? Ça ne doit pas faire peur ! Un Perdir qui a gagné l’estime du conseil de gestion a une assise solide et peut obtenir des financements, des soutiens pour toutes sortes de projets.
Mais cela ne signifie pas être tout-puissant. S’il a un grand pouvoir de décision, il doit aussi assumer lesdites décisions. Jusqu’à recevoir des coups dans la figure. Mais tant pis, le chef d’établissement n’est plus un caporal-chef que la Dasen siffle. Il n’est plus un fonctionnaire dépourvu de tout, de budget comme d’autonomie, à qui l’on demande juste d’être obéissant pas d’être compétent. Pour être reconnu à sa juste valeur, il faut travailler à l’étranger.
Le complément indispensable à ce témoignage ce serait, au niveau du syndicat, d’avoir des personnels de direction – ressources par zone car rien ne remplace la pratique du terrain.
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