Impressions d’arrivée – Floriane à Djibouti

La CFDT Éducation monde a recueilli le témoignage de Floriane lors de son arrivée à Djibouti.

Floriane à Djibouti, École de la Nativité

« C’est pas grave ! »

L’arrivée en famille

La première adaptation a été de vivre tous ensemble ! Mon mari militaire n’avait jamais été avec nous H24, 7 jours sur 7.

Ensuite, il faut être patient : on n’a pas tout, tout de suite.

Par exemple, les containers avec le canapé et les fournitures scolaires (entre autres) ont mis trois mois à arriver. En fait, c’est pas grave, on s’habitue à ne pas avoir son confort et la vie sans canapé n’est pas si difficile.

Nous n’avions pas de voiture non plus. Ce qui complique les déplacements et fait regretter de ne pas pouvoir découvrir le pays tout de suite. Mais quand un collègue nous a prêté une voiture pour 15 jours, moi qui adore conduire, j’ai freiné des quatre fers : « C’est quoi ces routes ? C’est quoi cette flotte ? J’y vais pas ! ». Puis, tu prends sur toi, tu patientes et tu acceptes assez rapidement.

On m’a toujours dit : « Tu observes, tu patientes, l’adaptation passe par là. »

L’arrivée au travail

En entrant dans la salle des profs je suis restée bouche bée. Il y a des photocopieuses, ça fait 40 ans qu’elles sont là, les chaises n’ont plus de dossier, c’est bruyant, il n’y a que 3 ordis qui ne fonctionnent pas souvent… Mais c’est pas grave, il existe toujours un plan B. Et je pensais à mes collègues en France : ils pèteraient un plomb, exigeraient un remplacement en urgence… Ici, on sait que rien ne se remplace alors tant pis.

Puis, direction la réunion de prérentrée. Je suis malade, il fait 50° degrés, l’ordinateur ne fonctionne pas et tout se fait à l’ancienne… En France, il y aurait eu un brouhaha de protestations et de commentaires narquois accompagnés de regards en coin. Bref, tout le monde aurait été occupé à se plaindre et à critiquer mais pas à écouter et moi, je me serais sentie encore plus patraque. Là, j’ai senti une totale absence de stress chez les collègues, ils étaient parfaitement tranquilles. Et ça m’a fait un bien fou. C’est vrai : c’est pas grave !

Le quotidien au travail

Tous ces problèmes techniques sont d’autant moins graves que je retrouve ici le sens de mon métier.

Je ne suis plus une machine à faire des photocopies et à répondre à des courriels s’enchaînant inexorablement. En 10 mois, j’ai dû recevoir l’équivalent de 2 semaines de courriels en France.  Ça ne veut pas dire qu’on ne travaille pas, ça veut dire qu’on travaille différemment. Pas de retour au mail que j’ai envoyé ? C’est pas grave ! Après tout, ce n’est pas ma responsabilité, moi je suis prof : j’enseigne.

D’ailleurs, il y a beaucoup plus de relationnel avec les élèves qui sont gentils et respectueux, qui prennent l’école au sérieux.  Et beaucoup moins de parasites au relationnel puisque le téléphone est banni des cours jusqu’en 3e.

En 2de, ils sont tolérés. Or c’est une classe expérimentale, nouvelle de cette année. Et je ne sais pas combien d’élèves j’aurai l’an prochain. Je suis dans l’attente et l’incertitude mais « c’est pas grave, je ferai avec, ça va aller, faut prendre la vie du bon côté ».

Mes compétences de prof sont aussi reconnues par ma hiérarchie. Un jour, le proviseur vient me chercher pour faire la réunion avec lui : il sollicitait mon expertise pédagogique. Bref, il y a eu collaboration réelle tandis qu’en France, le proviseur aurait dirigé seul cette réunion. D’ailleurs, on me reprochait d’en faire trop. Ici, on me donne des responsabilités.

 Faut avoir envie de s’adapter, et alors, ça fait un bien fou car on relativise. Et surtout, il y a toujours quelqu’un pour t’aider : on n’est jamais isolé, ça c’est impossible.


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