AEFE Argentine – Tensions sociales au Lycée Jean Mermoz de Buenos Aires

Fait inédit, les personnels recrutés locaux du Lycée Jean Mermoz de Buenos Aires, soutenus par les collègues détachés, ont appelé à la grève le 11 août dernier pour faire entendre leurs légitimes revendications salariales. Où en sommes-nous ?

Il aura fallu attendre que la grogne monte au point de déclencher une grève au Lycée Jean Mermoz de Buenos Aires, établissement en gestion directe de l’AEFE, pour que l’établissement se penche sur les revendications légitimes des personnels recrutés locaux et concède quelques avancées.

C’est en effet une perte de pouvoir d’achat de 96% sur 7 ans que les personnels déplorent aujourd’hui

Las de n’être pas entendus, vivant de plein fouet une forte paupérisation, les personnels soutenus par la section Sgen-CFDT alliée au syndicat argentin SADOP ont donc durci le ton. Après une grève très suivie, l’administration de l’établissement confrontée à un mouvement social d’ampleur a concédé quelques avancées. Insuffisantes.

AEFE Buenos Aires – Une administration dorénavant contrainte au dialogue

AEFE Buenos Aires
Formation syndicale à Buenos Aires

Contrainte au dialogue social, dans l’obligation de se déplacer dans les locaux du sous-secrétariat de l’éducation de Buenos Aires pour une médiation imposée, l’administration a proposé certaines mesures :

Parmi celles-ci, il est à noter :

  • prime exceptionnelle de 14% en août,
  • prime de transport  versée aux surveillants du primaire
  • avance de 30% sur les salaires des personnels enseignants pour devancer les accords paritaires, avance de 15% pour les surveillants du primaire et les intervenants du périscolaires
  • réévaluation de la prime de transport
  • annualisation des contrats des périscolaires : une mise en conformité avec la réglementation locale, d’après le syndicat argentin SADOP.

L’administration ne ferme par ailleurs pas la possibilité de mise en place de nouvelles mesures en 2023.

Pour les personnels, le compte n’y est pas

Les mesures prises et les pistes annoncées ne permettent cependant ni le retour à la stabilité économique des personnels recrutés locaux et de leur famille, ni de gagner en reconnaissance pour le travail accompli.

Les écarts de rémunération continuent de se creuser dans un pays soumis à un contrôle des changes et à une très forte inflation. Les grands gagnants en Argentine sont ceux qui sont rémunérés en devises étrangères. Les grands perdants ceux rémunérés en pesos.

Dans ce contexte, les grands perdants au Lycée Jean Mermoz sont les personnels recrutés locaux

Pour faire face à la crise, les personnels recrutés locaux se serrent la ceinture, donnent des cours particuliers et prennent pour certains un second emploi.

Une revendication forte, celle de la réduction des écarts de rémunération

Ainsi, à travail égal, les écarts de rémunération sont colossaux au sein d’un même collectif de travail. La section syndicale revendique une réduction rapide des actuelles disparités. En se basant sur le taux de change blue, les personnels évaluent un rapport de rémunération au sein de l’établissement allant de 1 à au moins 20.

Pour réduire cet écart colossal, une seule option : augmenter très significativement les personnels rémunérés en pesos

AEFE Buenos Aires – Un sentiment de mépris

De telles disparités doivent inviter à la plus grande circonspection. La mise en avant par l’administration de la situation économique de certains parents devient peu audible compte tenu des difficultés des collègues au quotidien. Les personnels s’en ressentent même méprisés. À leur connaissance, aucun parent n’a à ce stade retiré ses enfants pour des motifs économiques. Ils déplorent par ailleurs l’absence de démarche de l’établissement pour aller en quête d’un nouveau public et augmenter le nombre d’élèves scolarisés.

D’après eux toujours, il semblerait par ailleurs que les parents d’élèves méconnaissent les différences de statut et de rémunération au sein de l’établissement. Et par la même, les difficultés de la majorité d’entre eux. Les sensibiliser à leur cause, voila aussi ce qui fait défaut.

Pour le Sgen-CFDT, les solutions ne sont pas multiples mais toutes les pistes doivent être explorées. Par exemple, les personnels de droit local du poste diplomatique et de l’Institut français sont payés en devises étrangères. Dans tous les cas de figure, une augmentation significative des personnels ne peut se produire sans la contribution des parents via les frais d’écolage.

L’enseignement d’excellence est à ce prix dans cet établissement qui abrite également un institut régional de formation.


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